La France compte plus de 60 000 km de sentiers balisés que nous vous présentions dans notre sélection des 9 plus belles randos de France. Il y a quelques mois, Antoine et ses amis se lançaient à l’assaut du GR5, pour plus de 70 km de marche à travers les Vosges. Mikael et Jérôme sont quant à eux partis en Savoie pour deux jours de randonnée à la recherche d’une cabane de chasseur perdue dans les hauteurs.
Le voyage itinérant permet la découverte de nombreux paysages en un court laps de temps. Mais parfois on aimerait s’éterniser dans certains endroits, se laisser aller sans penser à l’itinéraire et aux futures étapes. Profiter du lieu, de la nature qui nous entoure et qui offre un environnement radicalement différent du quotidien.
C’est lors de mon dernier road trip en Espagne que l’envie d’une randonnée de deux jours en montagne avec bivouac est devenue pressante. Dès mon retour, ce projet était devenu quasiment obsessionnel.
Avec qui, où et quand ? Ces questions ont facilement trouvé des réponses. Un de mes meilleurs potes, Jérôme, habite en Haute-Savoie.
Il connaît très bien la montagne et est friand de ce genre d’expérience. Quelques SMS et coups de téléphones échangés : la date est fixée !
Une randonnée en montagne, surtout à l’automne ou en hiver, nécessite un minimum de préparation et d’équipements, c’est du moins ce qu’il me fait rapidement comprendre. Je me lance très vite dans la confection de mon paquetage : sous-vêtements chauds, collants, pantalons de randonnée, chaussures de randonnée, coupe-vent, lampe frontale, couverture de survie, doudoune, bonnet, gants, chaussettes chaudes, sac de couchage, poche d’eau de 3L, allumettes…
Fin octobre, un vendredi soir, je prends l’avion de Lille pour Genève, direction les Alpes. Le lendemain matin est réservé à la préparation des sacs à dos dans lesquels nous avons réparti équitablement les charges. Même pour deux jours, le poids est conséquent. C’est aussi l’occasion de faire un point sur le déroulement du weekend. Jérôme m’explique qu’il a fait du repérage et que nous dormirons dans une petite cabane de chasseur située entre le Petit Bargy et le Grand Bargy. Elle est “équipée” d’un poêle à bois, indispensable pour passer la nuit en altitude à cette période de l’année, et de vieux matelas : le grand luxe pour nous qui rêvons d’aventure !
C’est l’heure du départ mais avant de partir, arrêt obligatoire chez le fromager, le boulanger et le charcutier : ce soir, c’est fondue savoyarde ! Jessy, la compagne de Jérôme, nous dépose enfin au point de départ de notre périple. Nous profitons des derniers instants de chaleur dans la voiture.
Dehors, il fait déjà 0°c et l’herbe est gelée à l’ombre des montagnes. Cette fois, ça y est, nous y sommes.
La randonnée commence fort : nous entamons un long dénivelé mettant à rude épreuve mes pauvres poumons peu habitués à ces conditions de marche. Nous arrivons au Lac Bénit, à 1452 m d’altitude, où nous décidons de pique-niquer. J’ai déjà un pied plein de boue et une bosse sur le front à cause de mon appareil photo venu cogner mon visage lors d’une chute, mais le moral est au beau fixe. Nous profitons du décor, de l’air frais si agréable et des bons produits que nous avons apportés, dont le fameux saucisson de Magland, une spécialité du coin idéale pour ce genre de moment.
Derrière nous se dresse la paroi que nous nous préparons à affronter en guise de digestion. Ça me semble bien trop raide mais Jérôme m’explique que ce n’est qu’une impression. Une fois dans l’ascension, le dénivelé paraît moins important mais reste toutefois assez physique. Nous continuons notre parcours en prenant soin de suivre la carte. Le chemin n’est pas tracé, comme si nous étions les premiers hommes à passer par là. Sous nos pieds, des pierres partout. Chaque pas demande beaucoup de concentration, le sol est instable et il ne faudrait pas partir en arrière avec nos gros sacs à dos.
Pouvoir partager quelque chose d’extra-ordinaire avec un pote que je ne vois pas souvent.
La complicité et les fous rires nous font presque oublier l’effort. C’est aussi ça que j’étais venu chercher, au-delà de la randonnée et de la photographie. L’opportunité de faire une parenthèse dans nos vies respectives, à l’extérieur de nos couples, de nos familles, de notre travail et de la routine quotidienne. Le reste n’est finalement que prétexte, mais quel prétexte…
À mi-chemin de notre destination pour la nuit, nous rencontrons un homme désespéré qui nous demande si nous avons croisé quelqu’un. Il est en t-shirt alors que les températures avoisinent le 0… Mis à part 3 jeunes randonneurs avec qui nous avons discuté, personne. Il nous explique qu’il a perdu sa compagne. Elle ne répond plus à ses appels mais la dernière fois qu’ils se sont parlés elle disait voir un village et être entourée de roche et de sapins. Jérôme, qui connait bien le coin, identifie le lieu et décide de partir à sa recherche. Une demi-heure plus tard, nous étions tous les 4 réunis. Un magnifique moment de retrouvailles et d’apaisement. Une parenthèse dans notre aventure, juste avant notre arrivée à la cabane.
La nuit tombe mais nous arrivons sur les lieux. Là, c’est comme dans nos rêves : une petite cabane peu étanche qui tient difficilement debout, au milieu de nulle part, avec son poêle à bois, ses matelas sales, une planche en bois et des tréteaux en guise de table… C’est parfait ! Autour de nous, le ciel est magnifique, tout de rose et d’orange. Nous marquons une pause, chacun sur notre rocher, silencieux, à contempler le spectacle. Il n’y a plus de notion de temps, on vit le moment présent, nous sommes là et maintenant, tout simplement.
Au programme de la soirée : aller chercher du bois pour ravitailler le stock, nettoyer de fond en comble de la cabane (très très sale…), allumer le feu, déplacer le bois qui touche le poêle (on a évité un incendie…), préparer le repas, manger la fondue, boire un bon vin chaud, discuter, rigoler, beaucoup rigoler… Tout cela à la lumière de nos lampes frontales et des bougies et dans une chaleur incroyable. Il est tant de se coucher, la fatigue se fait sentir mais c’est sans compter sur les souris… La nuit fut reposante mais nous n’avons pas su atteindre le sommeil profond.
Peu importe, on n’est pas venus pour ça.
Le lendemain, nous décidons de lâcher prise et profiter au maximum de l’endroit. On rallume le feu et c’est parti pour un bon petit-déj diététique : oeufs sur le plat, lard grillé, pain, thé… De quoi se requinquer pour cette deuxième journée de marche. À l’extérieur, la brume enveloppe notre petit abri. L’atmosphère est totalement différente de la veille. Nous étions arrivé sous un ciel flamboyant, nous repartons sous un léger crachin et un brouillard ne nous permettant pas de voir au delà de 10 mètres.
La journée s’annonçait moins difficile que la veille mais le destin en a décidé autrement. Durant le premier kilomètre, nous suivons le chemin indiqué sur notre carte mais Jérôme pense qu’il est possible de couper la boucle pour atteindre plus rapidement le village Le Reposoir situé tout en bas.
C’est là que notre calvaire commence…
Plus de 900 m de dénivelé à travers une forêt dont le sol est tapissé de feuilles et de pierres qui glissent sous nos pieds. Nous avons mis plus de 3 heures, zigzaguant entre les arbres et nous arrêtant sans cesse pour vérifier notre trajectoire.
Malgré les difficultés, cette expérience restera gravé dans nos mémoires. Nous avons l’impression d’avoir été au bout des choses, d’avoir accompli ce que nous devions accomplir. Après un rapide pique-nique avec vue sur les montagnes, il est l’heure de rejoindre le centre du village où nous avons donné rendez-vous à Jessy. Une chose est sûre, nous avons beaucoup de chose à lui raconter.
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