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Pour découvrir la Nouvelle Zélande, certains choisissent le road trip entre amis, comme Quentin Pinczon qui nous racontait son hiver sur les routes glacées de l’île du Sud. Louis Dupont a préféré partir seul en misant sur le stop et le woofing, s’en remettre au hasard des rencontres et vivre des aventures insoupçonnées.
La Nouvelle Zélande m’a toujours fasciné. Peut-être parce que ce petit morceau de terre perdu entre la mer de Tasman et l’océan Pacifique fut le dernier pays découvert par l’Homme, il y a seulement 1000 ans. Trente-cinq heures d’avion seront nécessaires pour rejoindre l’autre bout du monde. J’y resterai quatre mois, seul, avec mes deux appareils argentiques.
Mon objectif principal est d’être au plus proche de la nature. Je fais le choix d’être seul pour l’apprivoiser, et m’apprivoiser par la même occasion. Parti avec un niveau d’anglais plutôt médiocre, un mois sera nécessaire pour pouvoir communiquer correctement avec les locaux. D’autant plus que pour un Français, l’accent néo-zélandais se rapproche du patois ch’ti ! Pour percer cette barrière linguistique et créer un réel contact, le woofing – travaux chez l’habitant en échange d’un lit, d’un couvert et d’expériences inégalées – est mon meilleur allié.
Arrivé à Auckland, je pars immédiatement pour trois semaines de road trip. Il faut que je m’échappe de la grande ville et de ses lumières. Direction le Nord pour une boucle qui me mènera de la péninsule de Coromandel à Raglan. On est en janvier, donc en plein été. L’eau est turquoise et le soleil omniprésent. Je quitte ensuite le Nord pour rejoindre la Surf Highway et la région de Taranaki. J’enchaine deux bus et trois sessions de stop pour parcourir ces 350 km.
Je rencontre une famille kiwi qui vit de l’océan, pour l’océan et sur l’océan. Peter, le père, m’enseigne la pêche au thon et au kahawai. Bronnie me confie ses secrets pour cuisiner le poisson. Avec Daniel, je surfe tous les soirs, sous ce ciel de fin d’été, à l’ombre du volcan Taranaki.
Les Néo-zélandais que je rencontre sont de véritables trappeurs. Ils savent construire, réparer, manier un fusil ou une canne à pêche comme personne. Leur style de vie tend vers une forme d’épure qui embrasse l’essentiel : vivre en harmonie avec cette nature exubérante qui les entoure. Je reste trois semaines chez eux, ce qui me semble beaucoup trop court, mais l’aventure et l’incertitude me manquent.
Après un mois et demi dans l’île du Nord, je prend le ferry à Wellington pour rejoindre la grande île du Sud et la région de Nelson. Sam me prend en stop à la sortie du ferry. Il me montre ses armes, ses trophées et me parle de la passion familiale : traquer le sanglier dans le bush néo-zélandais. Connue comme le bastion hippie du pays, la région me fascine. Entre les courts d’eau, les montagnes, l’océan… Les randonnées sont infinies et les paysages indescriptibles.
C’est ici, et après deux mois et demi, que je commence à apprécier la solitude. Je me sens plus réceptif à ce pays, cette nature et moi-même. Paradoxalement, cet état d’esprit favorise les rencontres, que ce soit avec les habitants, les pêcheurs, cueilleurs ou randonneurs, mais aussi les cochons, poissons, cerfs et oiseaux.
Être seul n’implique pas une grande logistique mais beaucoup de volonté. Comme pour cette randonnée dans Victoria Forest Park. Sans aucun réseau ni personne pour m’indiquer le chemin, je me perds trois jours entre les massifs escarpés. Des conditions extrêmes auxquelles je n’étais pas préparé. Mais ici, quand seule compte la survie, le corps et l’esprit trouvent des ressources insoupçonnées.
Je voyage un mois en stop et bus, le long de la côté ouest. Sur la route, je croise des villes fantômes où les vieilles voitures et cabanes en taule racontent une histoire révolue. En cet automne néo-zélandais, les couleurs sont uniques. Mon aventure se termine à Christchurch, ville ravagée par les tremblement de terres mais toujours aussi colorée. Beaucoup de gens y travaillent la terre parce que le sol y est plus plat qu’ailleurs. Du coup, je passe deux semaines chez les Lepine, éleveurs de moutons de père en fils, du côté de Cheviot. On est en juin, c’est le début de l’hiver, je passe mes soirées au coin du feu ou en 3e mi-temps de rugby avec le fils aîné.
Ce pays m’aura offert bien plus d’aventures que je n’aurais pu l’imaginer : crapahuter des heures pour un lever de soleil sur la forêt, marcher 10 km dans le sable pour trouver une falaise calcaire. Gravir une montagne pour dormir dans une hutte isolée. Pagayer 30 minutes pour une vague en face d’un volcan. Avoir peur, froid, chaud, faim. Être fatigué, excité, déprimé, vivant. Pour qui rêve de nature, la Nouvelle-Zélande est le voyage ultime. Pour les autres, elle sera une révélation.
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